La Terrasse des Canaux, carrefour des initiatives solidaires

Difficile de ne pas voir la Terrasse lorsque l’on se promène sur les rives du bassin de la Villette. Sa structure en bois de toutes les tailles et de toutes les teintes attire immanquablement le regard. On entend de la musique et des personnes discutent autour des tables. La Terrasse de la Maison des Canaux, lieu consacré à l’économie sociale et solidaire (ESS) sous toutes ses formes, accueille quotidiennement quatre à cinq entrepreneurs solidaires. Tout l’été, ils font découvrir au public quelque 150 initiatives qui participent à l’évolution de la ville de demain. Dans cet espace propice aux rencontres, des solutions se dessinent pour l’alimentation durable, les mobilités douces, les constructions plus respectueuses de l’environnement, les énergies propres, etc.

Avec son enthousiasme débordant, Maela Fichet-Delavault est ravie de nous faire découvrir son stand jonché de céramiques en tous genres. « Elles sont fabriquées par une jeune céramiste tunisienne. Vous pouvez aussi voir des tapis 100% laine fabriqués par des femmes berbères de Tunisie. La teinture est végétale, certains motifs sont traditionnels et d’autres ont été créés par moi », détaille la jeune femme. Celle qui n’a pas hésité à quitter son CDI il y a un an pour se lancer dans l’aventure de l’artisanat avec La Viguela, son entreprise, ne le regrette pas. Quant à nous, on se laisserait presque tenter par une jolie carafe blanche en terre cuite ou par un dessous de plat en raphia…

Encourager à créer sa propre activité sociale et solidaire est justement l’objectif poursuivi par les Cigales d’Île-de-France, association représentée à la Terrasse des Canaux par Jean-Claude Gallant, gentil retraité au sourire timide et bénévole depuis onze ans. L’association rassemble des clubs d’investisseurs qui veulent soutenir la création d’entreprises sociales et solidaires. « Nous donnons un coup de pouce à ceux qui prennent des risques pour créer leur emploi, explique Jean-Claude (photo ci-dessous). En investissant au minimum 8 euros par mois, chacun peut soutenir des projets locaux, souvent liés au bio et au changement climatique. »

À côté du doyen se trouvent les deux benjamins de la journée, au discours déjà bien rôdé. Morgane et Maxime veulent rendre la mode éthique et écoresponsable avec Crush On, une plateforme de vente en ligne qui met en relation des friperies, des créateurs vintage et des clients : « On veut donner un côté moderne au vintage et faire découvrir les pépites qu’on peut dénicher dans les friperies », détaille Morgane. Et Maxime d’ajouter : « Et tout ça depuis son canapé ! » Les vêtements qu’ils ont chinés pour l’occasion, avec leurs coupes originales et décalées, devraient faire le bonheur d’un amateur de vintage.

Au stand voisin, ce sont d’autres préoccupations qui animent Sébastien Barthélémy et Jon Langridge, à l’origine de Factio, une plateforme de lobbying citoyen. Las de constater que les citoyens sont ignorés des politiques, ils veulent leur redonner de la voix et du pouvoir. « Concrètement, en un clic, l’utilisateur de Factio alerte son représentant parlementaire (député ou sénateur) sur un sujet qui le préoccupe », explique Sébastien. Cela peut se faire dans le cadre d’un mouvement de citoyens, ou suite à l’appel d’une organisation ou d’un think tank. « Notre mot d’ordre est simple : citoyens, regroupez-vous! L’outil n’a que deux mois, mais il y a déjà entre 2 500 et 3 000 inscrits, rejoints chaque semaine par 200 nouvelles personnes. », poursuit le trentenaire. Cet outil d’engagement de la communauté, simple, rapide et efficace, souhaite rendre les représentants politiques responsables de leurs actions et de leurs votes. Ravis de pouvoir présenter leur création au grand public, ils le sont aussi par le site de la Maison des Canaux, installée au bord du canal de l’Ourcq : « On est contents qu’un cadre aussi agréable que la Terrasse soit mis à disposition pour mobiliser les citoyens et leur donner envie de s’engager. »

Nous terminons notre visite chez le traiteur Sezono, tenu par sa fondatrice Ai Loan et sa mère. Vêtue d’un joli tablier vert sapin et armée d’un grand sourire, elle résume le chemin parcouru depuis son emploi de conseillère en stratégie d’entreprise à celui de traiteur : « Il y a un an et demi, j’ai quitté mon emploi avec l’objectif d’ouvrir mon restaurant dans le nord-est de Paris. J’ai toujours aimé la cuisine, et plus particulièrement les légumes. J’avais envie de partager cette passion. » Qu'à cela ne tienne : nous goûtons son gaspacho de tomates, courgettes et menthe. Rafraîchissant et savoureux ! « Tous mes produits sont bios, de saison, et sourcés en Île-de-France : je travaille en direct avec les producteurs franciliens. » Ai Loan est encore à la recherche d’un local où exercer pleinement son activité. Elle aimerait la compléter d’un marché de producteurs et d’ateliers de cuisine pour que « tout le monde sache enfin cuisiner les légumes, et notamment les topinambours… » Sacré défi !