Sur la piste de l'enceinte médiévale Philippe-Auguste, rive gauche (2/2)

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Mise à jour le 09/05/2022

Plaque apposée sur le mur Philippe-Auguste au 5-7 rue Clovis, dans le 5e.
L'enceinte Philippe-Auguste, construite entre 1190 et 1215, a laissé de nombreuses traces dans Paris. Vestiges du mur et de ses tours, plaques, alignement des immeubles, tracé des rues… partons à leur découverte !
N'en déplaise aux défenseurs invétérés de la rive droite, il se passe aussi des choses rive gauche ! Et tout a commencé il y a 800 ans, sous le règne de Philippe Auguste. C'est de ce côté du fleuve que se poursuit notre balade sur les traces de l'enceinte qui porte son nom.
Au contraire de la rive droite où résident les artisans, commerçants et bourgeois aux poches bien remplies, la rive gauche accueille à l'époque plutôt les congrégations religieuses, abbayes et monastères qui se sont implantés sur ces terres marécageuses. Difficile alors pour Philippe Auguste de leur faire financer l'édification de l'enceinte. Le roi de France puisera donc dans ses propres réserves pour faire construire ce mur de 2 600 mètres de long entre 1200 et 1215.

Le mystérieux immeuble en briques du boulevard Saint-Germain

7, boulevard Saint-Germain. Immeuble construit sur le tracé de l'enceinte.
Discrètement niché entre deux confrères aux allures haussmanniennes, ce petit immeuble en briques n'attire pas forcément les regards. Et pourtant, son aspect original et son étroitesse devraient susciter des interrogations…
Certains se demanderont comment faire tenir un canapé dans un appartement de 3 m de large. D'autres s'interrogeront sur la taille de l'immeuble et sur son emplacement, boulevard Saint-Germain (5e). Car il semblerait bien qu'il ait été construit dans l'épaisseur de l'enceinte Philippe-Auguste.
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Et sous la Poste coulait une rivière

La Seine n'est pas la seule rivière parisienne. Mais sa petite sœur, la Bièvre, est bien moins connue. Et pour cause, elle est enterrée depuis plusieurs siècles.
En 1200, elle coule encore des jours heureux en plein air. Le cours d'eau rejoint la Seine au niveau de la gare d'Austerlitz actuelle tandis qu'un bras a été dévié pour alimenter en eau les moines de Saint-Victor. Pour permettre l'évacuation de ce petit cours d'eau jusqu'à la Seine, une arche a été construite dans l'enceinte Philippe-Auguste.
Pour voir l'arche de vos yeux, il faudra en revanche s'armer de patience. Il est possible de l'admirer lors des Journées européennes du patrimoine, le troisième week-end de septembre, qui permettent d'accéder au sous-sol de la poste de Paris Jussieu (5e).

Repousser les limites de la ville

Plaque attestant de la présence de la porte Saint Victor rue des écoles, sur le tracé de l'enceinte Philippe-Auguste
Lors de sa construction, l'enceinte protège une superficie d'environ 273 hectares, soit un peu moins de 3 km². En comparaison, Paris mesure aujourd'hui 105 km² si on y inclut les bois de Boulogne et de Vincennes.
50 000 Parisiens y vivent alors. Au fil des siècles suivants, la ville s'étend et se densifie. Sous François Ier (1515-1547), de nombreuses portes de l'enceinte sont détruites, car elles entravent la circulation et gênent l'expansion de la ville. Les dernières portes restantes seront démolies sous Louis XIV (1643 - 1715), comme ce fut le cas de la porte Saint-Victor (5e).

Quand l'enceinte influence encore le paysage actuel

Perspective sur la rue d'Arras qui longe le tracé de l'ancienne enceinte Philippe-Auguste (sur le côté droit).
Rues tortueuses, artères rectilignes, impasses, dénivelés soudains, noms de rue originaux… L'urbanisme parisien peut parfois sembler déroutant et poser question. Certaines réponses se trouvent dans les livres d'histoire… Et se matérialisent sous les yeux des promeneurs.
Rue d'Arras (5e), en haut de l'escalier qui mène à la rue Henri-Lartigues, une belle perspective est offerte. Le côté droit de la rue longe le tracé de l'enceinte et les immeubles sont sans doute adossés sur des vestiges du mur.

Le cauchemar des maçons…

Large portion du mur Philippe-Auguste visible rue Jacques-Henri Lartigues
Depuis 800 ans, le mur a bien résisté à l'usure du temps. Y compris lorsqu'il n'a pas été construit dans les règles de l'art, comme c'est le cas rive gauche.
Derrière la caserne des pompiers de la rue Cardinal-Lemoine, sur la rue Henri-Lartigues (5e), on peut admirer un tronçon de plusieurs mètres de long qui a la particularité d'être penché.
Nul besoin d'avoir fait cinq ans de maçonnerie pour comprendre le problème : un mur construit en suivant la pente est plus susceptible de s'effondrer qu'un mur construit sur plusieurs niveaux pour s'adapter à l'inclinaison du terrain.
Mais alors, pourquoi les bâtisseurs de Philippe Auguste l'ont-ils construit de cette manière ? Par manque de temps ? De moyen ? Ou pour une autre raison ? Le mystère demeure…

Un mur au milieu du trottoir !

Au 5-7 rue Clovis, on peut admirer le mur dans toute sa largeur. A cet endroit, il mesure environ 3m de large et 9m de haut.
Mais que font les agents de la voirie ? Un mur empiète sur le trottoir de la rue Clovis (5e) ! À moins que le trottoir n'ait été construit après le mur ? C'est plus probable.
Car le mur a été conçu pour durer. Avec un parement extérieur et un parement intérieur rempli de mortier, il est extrêmement solide. À sa base, il mesure environ 3 m contre environ 1,90 m au sommet. La largeur du mur avait été pensée pour que deux soldats en armure puissent s'y croiser pendant leurs rondes ou pendant une attaque. En hauteur, le mur mesure 8 à 10 m de haut.

Un immeuble plat intriguant

Immeuble de la rue Thouin construit adossé à l'enceinte Philippe-Auguste
Non loin du Panthéon et de sa coupole ronde, un immeuble plat interroge. Pourquoi une largeur aussi faible compensée par une certaine hauteur ? Tout simplement parce qu'au pied de l'immeuble du 4, rue Thouin (5e) se trouve notre fameuse enceinte en support.
Coincé entre l'enceinte et la rue, l'immeuble en question n'a eu d'autre choix que de s'étendre en hauteur.

Savoir lire entre les lignes

Les numéros 5 et 7 de la rue Soufflot laissent deviner la présence de l'enceinte en parallèle de leur alignement.
Pister la trace de l'enceinte Philippe-Auguste requiert parfois un peu d'imagination. Les immeubles des numéros 5 et 7 de la rue Soufflot (5e) en sont un bon exemple. On observe un léger décrochage de ces deux immeubles par rapport à la chaussée et à l'immeuble suivant au numéro 3. La raison ? Tous deux sont parallèles à l'enceinte.
Pour mieux s'en rendre compte, consulter une carte du quartier est indispensable. En suivant la rue de l'Estrapade puis la première moitié de la rue des Fossés Saint-Jacques, on parvient à deviner le tracé de l'enceinte qui rejoint le croisement de la rue Soufflot et de la rue Saint-Jacques.
À cet endroit se trouvait d'ailleurs une plaque indiquant l'ancienne porte Saint-Jacques (plaque visible au 172, rue Saint-Jacques), détruite en 1684.

Une tasse de thé au pied d'une tour ?

Tour restaurée située dans un ancien salon de thé du passage du Commerce Saint-André
Avis aux amateurs et amatrices de salon de thé : un local était récemment à reprendre cour du Commerce Saint-André (6e). Petite particularité à prendre en compte avant de signer le bail commercial, l'une des tours de l'enceinte se trouve au milieu de la salle principale.
Très bien conservée, elle est mise en valeur par un jeu de lumière et donne à la clientèle le loisir de l'admirer de près.

Apprendre le français dans une ambiance médiévale

Une tour et une partie de l'enceinte sont parfaitement visibles dans l'amphithéâtre d'une école de langues du passage Dauphine.
Les étudiants de l'école de langue située passage Dauphine (6e) savent-ils qu'ils apprennent à manier la langue de Molière au pied de l'enceinte d'un grand roi médiéval ?
Encore une fois, la ville offre un cadre d'apprentissage original pour ses étudiants, qu'ils viennent de France ou d'ailleurs. Profitez-en pour redécouvrir nos 7 anecdotes surprenantes sur les universités parisiennes !
Attention, cet endroit n'est pas en libre accès.

Un parking au décor particulier

Enceinte encore très bien conservée dans un parking situé en dessous du passage Dauphine.
D'habitude, les parcs de stationnement ne brillent guère par leur charme. Mais celui situé sous le passage Dauphine (6e) fait figure d'exception. On y trouve une longue portion du mur bien conservée et mise en valeur.
Plus intéressant encore, le mur est visible au niveau -1 et au niveau -2, ce qui permet de mieux se rendre compte de la taille de l'édifice.
Attention, cet endroit n'est pas en libre accès.

Là où tout s'achève…

Plaque détaillant le plan de la tour de Nesle, sur le quai Conti
C'est sur le quai Conti (6e) que s'efface la piste de l'enceinte Philippe-Auguste. On y trouve une plaque signalant la présence de la tour de Nesle (le « s » ne se prononce pas !), grande tour défensive construite en face de la forteresse du Louvre.
Non loin de là, une tour a été découverte lors de travaux menés au sein de l'Institut de France.
Si vous avez manqué la première partie rive droite, empruntez donc le pont des Arts et dirigez-vous vers la cour carrée du Louvre !

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Pour aller plus loin

  • À la découverte… de l'enceinte de Philippe Auguste, Michel Bastien, Alexandre Gady, Association pour la sauvegarde et la mise en valeur du Paris historique 1996, Impr. Maulde et Renou.
  • Notice sur les anciennes enceintes de la Ville de Paris, Ramond du Pouget, Cécile-Etienne-Bernard, 1826, Impr. J. Gratiot.

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